COMMENTAIRES DU SÉFER YETSIRAH
Préambule
Pour se mettre dans l'ambiance de ce petit livre, il faut évacuer en soi l'inutile et communier avec les 32 entités proposées, dix attributs divins appelés séfirot et vingt deux lettres de fondement de l'univers.
En fait, on part du principe que la pensée divine s'est transformée en une volonté de création, pour une raison inconnue, raison qui est laissée au libre choix de chacun.
Et chacun de nous, par sa propre pensée, va essayer d'entrer en relation avec les instruments ou les outils de la création d'une part, et avec les moyens intermédiaires obtenus, appelés "sentiers de la Sagesse", d'autre part.
On va donc à la rencontre des traces du divin et non pas du divin lui-même qui baigne dans le secret, et qui est désigné par différents noms qu'on analysera ci-dessous.
Les 3 outils de la création ont tous la même racine s/p/r: l'écrit, le compté et le raconté, ces trois outils de travail faisant référence à l'espace (écrit), au temps (compté) et à l'âme individuelle (raconté, en chantant de préférence).
Avec ces trois outils le divin trace et crée ce qu'on appelle les 32 sentiers de la Sagesse, séfirot et lettres, qui ne sont pas de même nature, qui sont "formés" dans le monde intermédiaire et qui, eux-mêmes, "forment" l'univers créé. Un "no man land" est créé pour éviter d'entrer trop en contact avec le divin; c'est l'image de l'antichambre ou du sas de la double porte avant d'entrer chez le Roi.
Il y a donc un paradoxe: celui qui est en quête doit pouvoir faire des incursions dans ce monde intermédiaire pour "sentir" les traces du divin, séfirot et lettres; mais ce monde lui est normalement interdit. Il faut donc qu'il soit préparé à le faire et, s'il le fait, il prend des risques.
Séfer yétsirah, le livre de la formation, est un moyen d'aider celui qui est en quête à aller par la pensée à la rencontre de ces "traces". C'est un moyen d'étude réservé aux intellectuels. D'autres moyens sont plus adaptés à la majorité des gens, la prière et le don de soi, à condition que cela soit fait avec une ferveur désintéressée, ce qui est rarement le cas. Mais des gens simples, qui n'ont pas été élevées dans le rapport "donnant-donnant" transposé à D., parviennent intuitivement à pénétrer dans ce monde interdit où on peut faire des rencontres avec les traces du divin et avec soi-même.
Le rêve a été donné à tous comme un avant-goût du monde intermédiaire, puisqu'on arrive ponctuellement et d'une manière fugace, au niveau des séfirot inférieures netsah' et hod, piloté par un ange.
En revanche, entrer dans le monde intermédiaire, éveillé, nécessite une longue préparation. C'est pourquoi la lecture du "Séfer Yetsirah" peut être considérée comme ardue ou n'évoque rien au lecteur. Et tout commentaire de ce livre ne peut être qu'une aide particulière pour que celui qui est en quête puisse faire le travail personnel nécessaire à son cheminement. Le commentaire qui suit et qui résulte d'un travail en groupe n'est que le prélude d'une volonté de "retour". En tout état de cause, personne ne peut appréhender la totalité de l'Arbre de Vie, un mur se dressant à partir de Binah.
Titre
Séfer sur le plan sémiologique est un support (samekh) de la fructification ou du bourgeonnement (pé/resh). La racine de Yetsirah se réfère à la création de formes à partir d'une pulsion instinctive et à travers une voie étroite, une image étant celle de pousser une pâte dans une "forme".
Ainsi le titre "séfer yetsirah" annonce le bourgeonnement de formes, séfirot et lettres.
Pour se fixer les idées, on peut faire le parallèle avec la lumière primordiale, qui est à la fois ondes et particules, les ondes pouvant faire penser aux séfirot et les particules aux lettres, séfirot et lettres résultant d'un même flux ou d'un même épanchement de la lumière primordiale (shefaa' or hiyouli).
Suite: commentaires du chapitre 1
Albert SOUED – déc 2000