INITIATION AU BAHIR, LE LIVRE DE LA CLARTE

----

Bénédiction Et Louange Dans Le Bahir

 

Albert SOUED - 17 mars 2002
Retour à cours et conférences

 

Voir aussi dans le Bahir: lumière - arbre - rêve - soukhot - loulab - étrog - alef-betghimel-dalet-hé  - serpent - liens avec Séfer Yetsirah

 

L'édition Verdier du Bahir a l'avantage de présenter en annexe un index thématique qui permet l'étude de thèmes en choisissant les "mishnayot" ou paragraphes pouvant être reliés au thème choisi. Nous avons sélectionné 5 paragraphes 3-4-5-6-7 sur les 10 proposés pour illustrer la bénédiction et la louange dans le Bahir.

 

 

Mishnah 3

Et pourquoi la Torah commence-t-elle par la lettre Bet?

Parce que le mot "Bérakhah" ou bénédiction commence, lui aussi par cette même lettre.

Et d'où savons-nous que la Torah est appelée "bénédiction"?

Il est dit dans Deutéronome 33/23: "Ô Naftali! Rassasié de volonté et comblé de bénédictions de D., que le Couchant (mer) et que le Midi soient ton héritage!"

Or "la mer", c'est la Torah, ainsi qu'il est dit dans Job 11/9: "Elle est plus étendue en longueur que la terre, plus vaste que l'Océan!"

Et que signifie l'expression "et rempli de bénédictions de yod-hé-waw-hé" ?

Cela veut dire que partout où on trouve la lettre Bét, c'est un langage de bénédiction, comme nous disons "béréshit", au commencement. Il n'est pas de commencement qui ne soit sagesse, ainsi qu'il est dit dans Psaume 111/10: "Le principe de la Sagesse, c'est la crainte de l'Eternel, gage de précieuse bienveillance pour ceux qui s'en inspirent. Sa gloire (louange) subsiste à jamais".

Et il n'est de sagesse qui ne soit bénédiction car il est dit "et D. bénit Salomon" et il est écrit dans IRois 5/26: "Le Seigneur avait doté Salomon de sagesse, comme il le lui avait promis. Hiram et Salomon vivaient en paix, et ils conclurent entre eux une alliance".

Ceci est comparable à un roi qui marie sa fille à son propre fils, en lui disant "Use d'elle à ta guise"

 

La Torah qui est l'enseignement par excellence est assimilée à une bénédiction car comme la bénédiction qui se dit bérakhah, elle commence par la lettre Bét (voir exposé sur alef-bet). La lettre "bét" peut être comprise comme une intériorité qui s'édifie à l'image d'une maison qu'on construit (partie intérieure à nous même que nous cherchons à saisir et à ordonner).

La Torah est assimilée à l'eau de la mer, dont le contenu est apparemment illimité. En fait l'eau de la mer est limitée dans son contenu comme la Torah, mais l'étude de cette même Torah, enseignement par excellence, n'a d'autres limites que celles du cerveau humain, et c'est déjà une bénédiction.

La sagesse est assimilée à une bénédiction, parce que la Sagesse est la vertu ou l'attribut (séfirah) qui est la limite supérieure sur l'Arbre de Vie au delà de laquelle tout humain ne peut accéder, et c'est cela qu'on appelle "la crainte de D.", en hébreu "yir-at adonay". Encore cette Sagesse n'est atteinte que par de rares individus privilégiés choisis, comme Moïse ou le roi Salomon. Être doué de Sagesse, c'est pouvoir parvenir à la paix, et c'est en ce sens que la Sagesse est une bénédiction.

 

L'Arbre de Vie est une image du monde intermédiaire entre le divin et l'humain. Le monde matériel reçoit le flux d'en haut, sous forme de bénédictions qui traversent ou cheminent le long des "séfirot", ou attributs divins. La bénédiction ou "bérakhah" peut s'écrire en hébreu "bet" "rakhah", c'est à dire maison ou fille ou intériorité douce. Dans notre mishna, un des fils de Jacob, Naftali en est comblé, parce qu'il a une volonté puissante, ainsi que Salomon parce qu'il a la sagesse. Volonté et Sagesse sont des qualités bénies pour cheminer dans l'existence, et l'"intérieur de la maison" devient doux.

Mais comment expliquer la dernière phrase de la mishnah? Car il s'agit bien d'un inceste interdit. On ne marie pas son fils à sa propre fille.

Est-ce une allusion à la sagesse de Salomon qui l'a mené à accepter les idoles dans son palais ? Et que "Sagesse" et "humain" sont antinomiques, puisque au delà du discernement ou "Binah", la montée de l'Arbre de Vie est interdite.

On peut donner une autre explication: la bénédiction n'est pas de même nature que la sagesse et il ne faut pas mélanger ces deux notions. En effet dans la bénédiction, le flux qui vient d'en Haut a un écho dans l'être humain, puisque celui-ci bénit D. et le flux de bénédiction remonte par la prière de l'homme (ceci illustre la rapport entre bénédiction et genou, bérekh, et bérekh + hé= bérakhah, l'humain à genoux, reçoit et donne par le souffle du "hé").

Mais pour la sagesse et la connaissance, l'être humain reçoit  puisque D. lui donne la possibilité de "connaître" ou de "savoir", en lui envoyant la Torah et à certains la Sagesse. Mais là D. n'a pas besoin de recevoir en retour, puisqu'il est omniscient.

Il y a une réciprocité de flux dans la bénédiction, pas pour la sagesse.

 

 

Mishnah 4

Et quelle est cette Bérakhah ou bénédiction, dans l'expression "baroukh hou" ou "il est béni"?

C'est comme si on disait "bérekh hou" ou "il est le principe du genou", comme il est écrit dans Isaïe 45/23:"J'ai juré par moi-même: c'est une parole vraie qui est sortie de ma bouche et qui ne sera pas révoquée. Que tout genou pliera et que toute langue prêtera serment!", l'endroit où tout genou plie.

À quoi est-ce comparable? À tous ceux qui voudraient voir le roi, mais ils ne savent pas où se trouve sa maison, et ils demandent d'abord où est la maison du roi, et ensuite, où se trouve le roi lui-même. Et c'est pourquoi, il est écrit "que tout genou pliera", même celui des êtres célestes --- et "toute langue prêtera serment".

 

 

Cette mishnah est en rapport avec les anges qui sont des êtres qui obéissent aux ordres divins comme les soldats d'une armée et qui ne savent pas plier les genoux, en ce sens qu'il leur est interdit d'envoyer des bénédictions à D. contrairement aux humains. En fait les anges sont chargés de véhiculer les flux de bénédictions, souvent en araméen, langue non comprise par les anges.

La clé de la mishnah est qu'à la naissance ou au commencement de la vie d'un être humain, un ange arrive et met le doigt sur la bouche du nouveau né, comme pour lui dire de se taire, en fait pour qu'il oublie la Torah reçue quand il était désincarné (on garde la trace de cela au dessus et au dessous de la bouche). On fait ainsi le deuil de la Torah pendant trois ans (ceci expliquerait la soupe de lentilles qu'on absorbe à la circoncision, repas de deuil). A trois ans une première coupe de cheveux fête le début de l'apprentissage de la Torah. L'oubli a pour but de faire l'effort de réapprendre car la connaissance obtenue sans effort est appelée "pain de la honte" ou "lah'mah di kessoufah". Avant de voir le roi il faut apprendre à connaître la maison qu'il a construite.

 

 

Mishnah 5

Rabbi Reh'oumaï interpréta le verset Deut 33/23 (voir Mishnah 3):"Ô Naftali! Rassasié de volonté et comblé de bénédictions de D., que le Couchant (mer) et que le Midi soient ton héritage!"

Or Bét est bénie en tout lieu car elle est la "plénitude", car il est dit "et comblé de bénédictions de D.". Et de là, il abreuve ceux qui en ont besoin. Et de cette plénitude, Il a pris conseil à l'origine (pour la création du monde).

Ceci peut se comparer à un roi qui voulait bâtir son palais sur des rochers durs. Il fait éclater les rocs, fend les roches et une grande source d'eaux vives en jaillit! Le roi dit "étant donné qu'il y a des eaux jaillissantes pour moi, je vais planter un jardin, et je m'en réjouirai, moi, ainsi que le monde entier".

C'est ce qu'exprime le verset des Proverbes 8/30: "Alors j'étais à ses côtés un artisan, dans un enchantement perpétuel, goûtant en sa présence des jours sans fin". C'est ce que dit la Torah "Pendant deux mille ans, je reposais donc au sein du Saint Béni Soit-Il, dans un enchantement", comme il est écrit "des jours sans fin" et chaque jour de D. dure mille ans, ainsi qu'il est dit dans Psaumes 90/4: "Aussi bien mille ans sont à tes yeux, comme la journée d'hier, quand elles est passée, comme une veille dans la nuit".

À partir de là, par la suite de temps en temps seulement, car il est dit "en toute époque".

Puis ce sera à nouveau en toute éternité "léo'lam", ainsi qu'il est écrit dans Isaïe 48/9: "Pour l'honneur de mon nom, je retiens longtemps ma colère, en faveur de ma gloire (louange) je la réfrène, pour ne pas te perdre (ou en ta faveur)".

Et que signifie "ma louange"?

Le sens se trouve dans le verset des Psaumes 145/1: Louange par David " Je t'exalterai mon D. le Roi, je bénirai ton nom jusqu'à l'éternité!"

Pourquoi "louange"? à cause de "je t'exalterai". Et que signifie "exalter"? "je bénirai ton nom jusqu'à l'éternité"

 

Cette mishnah commence par un clin d'œil, car le rabbi qui parle a un nom lié à la grâce ou à la miséricorde (rah'manout). En effet le monde a été créé grâce à une mesure de miséricorde qui a prévalu sur la rigueur. De ce bassin supérieur plein (malé, qui veut dire aussi près de l'unité, et de son silence), D. parvient à abreuver ceux qui en ont besoin et malé avec un aleph devient milah avec un hé, le souffle. Le silence du bassin de bénédictions s'est transformé en souffle de vie et en parole (milah) réconfortante de la Torah.

La Torah est la miséricorde-eau qui vient abreuver le monde matériel créé: la pierre brute devient un jardin paradisiaque.

 

Partent des hommes vers D. des bénédictions mais aussi des louanges, en hébreu "téhilah" (pluriel téhilot). L'homme bénit le nom de D. et il s'agit là du divin immanent. La louange concerne D. des hauteurs qu'on exalte, D. transcendant.

 

Mishnah 6

Et pourquoi la bénédiction?

Ceci est comparable à un roi qui aurait planté des arbres dans son jardin, et bien qu'il ait plu abondamment et que le sol ait été imprégné d'humidité, il s'est vu obligé de les arroser avec de l'eau de source comme il est dit dans Psaumes 111/10: "Le principe de la Sagesse, c'est la crainte de l'Eternel, gage de précieuse bienveillance pour ceux qui s'en inspirent. Sa gloire (louange) subsiste à jamais".

Et si tu objectes qu'il lui manque quelque chose, je te citerai la fin de ce même verset: "Sa gloire (louange) subsiste à jamais".

 

 

Ici il y a un jeu de mots entre "bénédiction et bassin" qui ont la même source. La crainte de D. est la limite qu'on ne doit pas franchir dans la quête de la connaissance du divin. Le bassin d'eaux vives s'écoule vers le bas.

Les arbres du jardin sont les "séfirot" de l'Arbre de Vie. L'arrosage ou l'alimentation de ces attributs grâce à la bénédiction de D. est nécessaire, malgré les louanges ou les prières montantes des humains qui les humidifient.

 

 

Mishnah 7

Rabbi Amoraï interprète le verset Deutéronome 33/23: "Ô Naftali! Rassasié de volonté et comblé de bénédictions de D., que le Couchant (mer) et que le Midi soient ton héritage!"

Moïse dit "si tu suis ses lois, tu hériteras de ce monde-ci et du monde à venir. Or le monde à venir est comparable à la mer, ainsi qu'il est dit dans Job 11/9: "Elle est plus étendue en longueur que la terre, plus vaste que l'Océan!"

Quant à ce monde-ci, il est comparé au sud, comme il est dit dans Josué 15/19: "Elle répondit (à Caleb) "Fais-moi une bénédiction, car tu m'as reléguée dans une contrée aride. Donnes-moi donc des sources d'eau". Et il lui donna des sources supérieures et des sources inférieures"

Et le mot Négev est traduit par le Targoum "le pays du sud".

 

Le monde à venir est apparemment illimité. Ce monde-ci est étroit et limité, aride. Il a besoin d'eau vive, pour être vivable. La bénédiction de D. à travers la Torah est vitale pour la survie.

 

 

Albert SOUED - 17 mars 2002
Retour à cours et conférences.

 

Voir dans le Bahir: lumière - arbre - rêve - soukhot - loulab - étrog - alef-betghimel-dalet-hé  - serpent - liens avec Séfer Yetsirah